• Zoulou.

    Zoulou.

     

     

    Nous étions allés choisir Zoulou au mois de juillet. Il était là au milieu de ses frères. Il avait les yeux fermés et cherchait le téton de sa maman. Il poussait de tous petits cris plaintifs comme font tous les bébés animaux et qui vous font fondre comme une livre de beurre.

    Certains diraient "dès que je l'ai vu j'ai su que c'était lui". Moi non : en fait, c'était celui qui, paraît-il ressemblerait le plus à un chat Siamois.  Comme j'aime bien les Siamois, je l'ai choisi uniquement pour l'argument précédent. Non pas parce que c'était une évidence, juste parce qu'on m'a dit qu'il ressemblerait à un Siamois.

    Nous l'avons laissé à sa mère et nous sommes repartis.

    Deux ou trois mois après, je ne sais plus, il faisait son arrivée dans la maison. Il avait pleuré beaucoup les premiers jours. Je me disais que c'était atroce de l'avoir arraché à sa maman. Puis, en pensant au sort de ses frères, je me disais que finalement, ici, il n'allait pas être si mal.

    Mon ami Renaud m'avait conseillé de lui faire un petit lit dans un carton avec un réveil. Ce procédé était censé lui rappeler les battements du cœur de sa mère et donc, le rassurer. Je m'étais exécutée, mais mon petit Zoulou savait déjà qu'il allait passer toutes ses nuits, non pas avec un réveil, mais avec moi. Dès la première tentative, il s'était extirpé de son berceau pour venir finir contre moi.

    C'est alors que notre vie ensemble a commencé. 

    Les câlins, les ronrons, les roulades quand je rentrais du travail. Les frottements aux mollets les matins, les coups de têtes cherchant les caresses, les séances de  pétrissage le soir devant la TV (cherchez sur Google, ignorants que vous êtes, bravo pour les autres). Quand je travaillais à mon bureau, il venait s'étendre sur mes feuilles, essayant d'attraper un stylo situé trop loin de lui, puis il roulait de l'autre côté. J'arrêtais de travailler pour le regarder, pour m'étonner devant l'insolite de l'une de ses poses.

    Quand je me suis faite jeter, il était là mon Zoulou. Il était devenu mon compagnon, qui rendait mon quotidien moins morose, moins solitaire.

    Il était aussi là quand je ramenais un mec à la maison. Qui chaque fois s'extasiait devant la beauté de ce petit sphinx.

    Et puis il a été là quand bébé est arrivé.

    Il a vécu tout ça avec moi.

    Mon petit Zoulou faisait peur à Matthieu. Il est vrai qu'il était joueur : quand il voyait un coude dépasser de l'accoudoir du canapé, il ne pouvait s'empêcher de le lacérer.  Idem pour les pieds qui osaient déborder du drap, la nuit, canicule ou pas. La peur au ventre de perdre une jambe dans la nuit, je connais ça.

    J'avais dû arrêter les cours particuliers de français, car la jeune fille était terrorisée par mon Zoulou.

    Zoulou c'était aussi un "scratch" au beau milieu de la nuit (comprenez la tapisserie qui perd en surface). C'était  également un pipi (voire même un caca) dans mon lit, si la litière n'était pas suffisamment propre pour monsieur.

    Des vomis de boulettes de poils au printemps.

    Des tonnes de poils blancs sur la moindre veste en laine qui traînait.

    Des balades dans le grenier de l'immeuble quand ce petit chenapan s'enfuyait. Je précise : ces balades étaient le plus souvent nocturnes dans un grenier sans lumière.

    Un regard de tueur.

    Vous l'avez compris mon Zoulou c'était quelque chose.

    Malgré tous les lacets qu'il m'a bouffés, tous les rideaux qu'il a déchirés, le pied de mon ficus qu'il a pris pour un griffoir, tous les cacas puants qu'il s'amusait à poser juste quand je venais de changer la litière, tous les fils qu'il a dénudés, bref malgré tout ça, je l'aimais mon Zoulou.

    J'en ai pris pleinement conscience l'année dernière en janvier, quand il s'est levé du canapé en toussant. Qu'il a commencé à respirer de façon anormale. Et qu'il est finalement aller rendre son âme à dieu. En 1 heure, mon Zoulou est passé d'une sieste sur le canapé à une tombe dans le jardin...

    J'ai pleuré pendant 15 jours.

    J'ai expliqué mon chagrin à plein de gens qui n'en n'ont eu absolument rien à foutre. J'ai même entendu l'impitoyable "oui bon, c'est qu'une bête".

    Mon beau Zoulou tu me manques encore. Tu me manqueras toujours.

    Ce que je préférais c'est quand tu faisais craquer les marches en bois de l'escalier malgré la légèreté de ton petit corps et que je voyais la porte de ma chambre s'entrouvrir. Tu venais alors me rejoindre, me réchauffer de ta présence.  Ce que j'aimais aussi c'est quand tu t'adonnais à une sieste express, assis au bord de la table, tes quatre pattes parfaitement alignées. Comme si être aussi beau t'avait fatigué.

    Bye mon Zoulou.

     

    Zoulou.

     

     

     

     

     

     

     

     


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